Saint Mathieu dans la tourmente

 Dramatic plunging cliffs kissed by restless waves, tiny secluded coves and breathtaking views make the coast a must for those romantics who love to stroll in the fresh breezes.
But centuries of battles against the abbey have left just ruins on this site of settlement, religious devotion and even literary  inspiration.

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     De nos jours, il n’y a que quelques maisons regroupées autour des ruines de l’abbaye, mais il ne faut pas croire que, dans le passé, Saint Mathieu se limitait uniquement à l’abbaye et à ses dépendances.
     Dès le début, une bourgade s’était établie, attirée par la côte, ses possibilités commerciales, ses richesses de bris d’épave et par la présence du monastère. « Port sûr et bien fréquenté, dont les habitants sont riches et font beaucoup de commerce», c’est en ces termes que l’on décrivait Saint Matthieu au XII° siècle. Le port très fréquenté était réputé auprès des Bretons mais aussi des Bayonnais et des Bordelais.

     L’animation régnait à saint Mathieu lorsque les navires partaient ou revenaient d’Angleterre ou de Bordeaux. Nous savons qu’aux XIII° et XIV° siècle, la ville comptait près de 2500 habitants et était composée de 36 grandes rues.

     Ces richesses et les reliques, que les pèlerins venaient vénérer de toutes parts, attiraient la convoitise des pirates qui débarquaient soit au Conquet, soit à Lochrist ( qui ne formaient avec Saint Mathieu qu’une seule agglomération prospère). Les reliques étaient emportées et tout était détruit par le glaive et par le feu. Le monastère était bâti comme un château – fort et les moines ne cessaient de demander aux ducs de Bretagne l’autorisation d’élever des murailles, ce qui leur fut accordé en 1409 par le duc Jean IV.

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     Si les murailles furent accordées, aucune troupe ne fut dépêchée, aussi les habitants avaient mis sur pied un tour de garde permanent et le sénéchal de Saint Renan était chargé de veiller à la bonne marche de cette milice.
Il avait, de plus, le droit de «haute et basse justice» et nommait le juge qui statuait sur toutes les affaires judiciaires.
     Les droits de prisons et les fourches patibulaires en étaient les sinistres conséquences.
     Vous pouvez encore contempler, sur la route qui mène à Plougonvelin, le «gibet des moines» : Deux menhirs christianisés, distants de deux mètres, sur lesquels les corps des criminels étaient exposés jusqu’à ce qu’ils soient dévorés par les charognards.

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     Les attaques dirigées contre l’agglomération de Saint Mathieu ne cessent pas de 875 (Normands) à 1597 (Espagnols), mais du XII° au XVI° siècles, ce sont surtout les Anglais qui pillent sans arrêt tout l’arrière pays.

     Le 12 Août 1288, une sanglante bagarre oppose des marchands de Bayonne, propriétaires de sécheries de poissons au Conquet et à Saint Mathieu, avec les habitants. Les Anglais, alliés des Bayonnais, brûlèrent le port et l’abbaye. Le roi d’Angleterre désapprouva ce raid et les obligea à payer une forte amende, ce qui ne les empêcha pas de recommencer 8 ans plus tard. Cette fois, c’est la flotte de Lincoln qui réclame des rafraîchissements. Prétextant d’être mal reçus, ils rééditent «leur exploit» de 1288.

     Aussi, en 1332, les moines décident-ils d’élever des fortifications autour de l’abbaye et de la ville. Dix maisons doivent être détruites, les propriétaires refusent et c’est par une charte datée du 25 juin 1332 que le duc ordonne que l’on rase ces maisons.

     La période de la guerre de succession ne sera pas de tout repos pour le cap de Saint Mathieu. Pendant 22 ans, le monastère sera pris et repris. En 1370 Du Guesclin et Clisson chargent les Anglais et en tuent 900 sur 1000 qui rejoignaient leurs vaisseaux chargés de butin. En 1372, ce sont les seigneurs bretons reniant l’alliance avec l’Angleterre qui font appel au roi de France ( Charles V) pour chasser les Anglais. En 1374, le duc de Bretagne rentre d’Angleterre avec de fortes troupes et reprend de force le Conquet et Saint Mathieu. 1430, 1512, 1513, l’histoire se répète et le 12 août 1513, l’océan semble s’enflammer

       A cette époque, les bretons sont outrés de la présence ostentatoire des navires anglais le long de leurs côtes. Le gouvernement est alerté et charge l’amiral Clermont de patrouiller en mer d’Iroise. Mis en présence d’une flotte ennemie, mais se sentant en infériorité numérique, ce dernier décide d’éviter le combat.
 

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     Dans sa flotte, un gentilhomme de Plouarzel, Hervé de Portzmoguer, commande le navire « La Cordelière. Construit à Morlaix, c’est un des plus beaux navires de cette époque.
     Placé en arrière garde de la flotte, Hervé de Portzmoguer, refuse de quitter le théâtre des opérations sans réagir. Il lance «la Cordelière» contre «le Régent». Après un combat acharné, refusant de se rendre, il décide de brûler son navire et de se jeter sur le Régent.
     Les deux navires flambent, puis explosent en face des habitants massés sur la côte pour suivre ce combat. Dans la bataille près de 2000 hommes périssent, et les anglais abandonnent la partie

  

Cénotaphe
de
Hervé de PORTZMOGUER
par
Germain de BRIE

Germain de Brie, né en 1488 à Auxerre devint secrétaire de la Duchesse Anne de Bretagne en 1512.
A la mort de cette dernière, en 1514, il entre dans la carrière ecclésiastique et devient aumônier du Roi François 1°.
Il meurt en 1538.

HERVEI CENOTAPHUM

Magnanimi manes Hervei nomenque verendum
Hic lapis observat, non tamen ossa tegit.
Ausus enim Anglorum numerosae occurere classi
Quae patrium infestans jam prope littus erat.
Chordigera invectus regali puppe, Britannis
Marte prius saevo cominus edomitis
Arsit Chordigerae in flamma, extremoque cadentem
Servavit moriens exido patriam.
Prisca duos aetas Decio miratur ; at unum
Quem confere queat nostra duobus habet.

Du magnanime Hervé, cette pierre honore les manes et le nom véritable sans toutefois recouvrir les ossements.
Il affronta l' imposante flotte des Anglais qui assaillait le rivage de nos pères.
Embarqué sur le vaisseau royal "la cordelière", après avoir triomphé des Britanniques dans un duel féroce.
Il brûla dans les flammes de "La Cordelière" et son sacrifice suprême sauva la patrie chancelante.
Si l'antiquité admire deux Décius, à notre tour nous en avons un qui en vaut bien les deux.

 

     1558, le Grand Amiral anglais Lord Clinton et le vice Amiral hollandais Waaken font cap sur Brest avec 170 vaisseaux. Marie Tudor, reine d’Angleterre, a décidé de prendre le port du Conquet pour se venger de la prise de Calais par le duc de Guise. 7500 anglais débarquent à Berthaume, brûlent 220 maisons à Plougonvelin, incendient une partie de l’abbaye, emportent livres, vases sacrés, orgues et cloches, détruisent entièrement la ville de Saint Mathieu et se dirigent vers le Conquet où ils ne laisseront debout que 98 maisons sur 450.

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     Heureusement le tocsin a alerté les paroisses voisines et, le soir venu, Guillaume du Châtel, seigneur de Kersimon (en Coat Méal), capitaine du ban de l’évéché de Léon, surgit avec une armée de 8 000 hommes, pour la plupart paysans, et tue 5000 anglais, les autres étant faits prisonniers et emmenés à Morlaix. Seuls, les hollandais purent en réchapper.
 

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     Si Saint Mathieu ne devait jamais se relever de cette journée, la ville du Conquet fut reconstruite.
     Les pertes sont considérables, mais, surtout, les religieux ne se sentent plus en sécurité. En 1688 ils demandent à pouvoir se réfugier derrière les remparts de Brest. Demande refusée, et ils resteront présents jusqu’à la révolution.
     En 1796, l’abbaye n’est qu’un immense champ de ruines vendu comme bien national au citoyen Budoc Provost, notable au Conquet. Celui ci l’avait acheté pour vendre les pierres. Il ne laissera debout que la tour sur laquelle on faisait brûler un feu pour diriger les marins

 

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